vendredi 7 octobre 2011

Analyse critique du texte « L’anorexie dans le doux âge de l’innocence » de Claudia Pelletier


Le texte de Claudia Pelletier traite de manière générale de l’anorexie chez les jeunes adolescents. L’auteure focalise ses arguments sur les filles souffrant de cette maladie : elle démontre que ces dernières nuisent à leur croissance et à leur santé en faisant preuve de mauvaises habitudes alimentaires, et atteste que ce sont les médias qui déforment leur perception de la beauté et les incitent à vouloir perdre du poids de manière drastique et dangereuse. Le but de l’argumentation est de souligner la gravité de l’anorexie auprès des enfants en expliquant les effets nocifs et les causes de ce trouble. On apprend dans la conclusion que Claudia vise à convaincre le lecteur de l’importance de la lutte contre l’anorexie par le biais de diverses solutions : elle croit notamment que les parents devraient s’impliquer dans la vie de leur jeune pour éviter cette affliction, par exemple en les éduquant de sorte qu’ils ne soient pas facilement endoctrinés par les médias.

Pour ce qui est de la thèse du texte, celle-ci n’est pas énoncée clairement dans l’introduction et n’apparaît que vaguement dans la conclusion (« il est important de trouver des solutions pour aider ceux qui souffrent de cette maladie. » ou « Elles doivent changer leurs perspectives… » pourraient constituer des thèses, mais ça pourrait aussi bien être autre chose compte tenu des arguments). Puisque la thèse est difficile à cerner, l’opinion n’est pas tout-à-fait claire non-plus et conséquemment, le tout ressemble plutôt à un texte explicatif sur l’anorexie. De plus, Claudia amène son sujet en disant que cette maladie est répandue parmi les jeunes filles, puis pose la question suivante : « Une simple frayeur à l’adolescence? » Ceci induit le lecteur en erreur quant au contenu du reste du texte car le sujet posé n’est pas en lien avec l’argumentation. D’autre part, le sujet divisé ne révèle qu’en partie ce dont discutera le texte et est donc incomplet (il ne parle que du sujet du deuxième paragraphe du développement, soit l’influence des médias, en omettant le premier paragraphe). En gros, le début du texte manque de limpidité.

En ce qui a trait aux arguments, s’ils en sont (car la thèse est inconnue et ne peut être que supposée), la cohérence varie d’une section à l’autre : le premier paragraphe est tout de même bien construit, les idées se suivent et sont appuyées d’une référence d’autorité ainsi que d’une statistique et de plusieurs faits, mais il manque une phrase de conclusion pour résumer l’argument et le solidifier. Le deuxième paragraphe, pour sa part, pourrait être grandement amélioré : Claudia débute en affirmant que les médias sont à blâmer dans toute cette affaire, mais les faits et les preuves qui suivent n’appuient pas l’idée initiale. Sans être totalement sans rapport, ils ne démontrent pas ce qu’elle semblait vouloir dire en début de paragraphe. Aussi, encore une fois, il y a absence de conclusion partielle.

Dans sa conclusion, l’auteure dégage soudainement une impression de confiance et de logique, qui remplace l’hésitation et l’ambiguïté précédentes, et qui aurait dû imprégner son texte au complet. C’est comme si un texte explicatif devenait subitement un texte argumentatif, car la conclusion est bien structurée, comportant une opinion, des solutions et une ouverture; seule la thèse semble toujours manquer à l’appel. Tout ceci fait que la conclusion n’est pas vraiment en lien avec l’introduction, alors elle ne peut remplir son rôle de récapitulation et de fermeture adéquatement.

À présent, examinons l’enchaînement et la fluidité du texte, ainsi que le langage utilisé. Le sens de certains passages demeure flou dans l’esprit du lecteur car il y est difficile de discerner ce que Claudia tente de communiquer. Ceci est souvent dû à un manque de liens entre les idées. Par exemple, lorsqu’elle écrit : « L’environnement culturel et social des enfants vient aussi ce lien. » et qu’elle continue avec un sondage sur les filles voulant perdre du poids (n’ayant pas préalablement expliqué la première phrase), les idées ne se suivent pas, ce qui provoque une confusion. Par ailleurs, malgré le fait que le vocabulaire emprunté soit admirable, certaines erreurs grammaticales ou structurales affectent parfois la facilité de lecture, et une plus grande utilisation de marqueurs de relation conférerait une meilleure régularité au texte. Enfin, le titre est approprié, quoique formulé de manière légèrement douteuse (« doux âge »), mais aisément corrigible, et il sied bien au sujet étudié.

Dans l'ensemble, c'est principalement la structure du texte qui est à revoir et à perfectionner pour qu'elle ressemble plus à celle d'un texte argumentatif. Il y a du potentiel; simplement, il faut réorganiser les faits et les preuves déjà présents autour d'une thèse et d'une argumentation solide, où l'opinion est claire. Ainsi, le lecteur pourra facilement suivre le fil des idées de l'introduction à la conclusion, qui achèvera le processus argumentatif en le convainquant grâce à la réitération et au renforcement final.

dimanche 2 octobre 2011

Un affreux concours de circonstances

            
            Mercredi le 21 septembre dernier, Troy Davis, un Américain noir âgé de 42 ans, a été mis à mort dans l’état de Géorgie. Il aurait supposément perpétré le meurtre par arme à feu d’un policier blanc. Pourtant, depuis sa condamnation en 1991, Davis a clamé son innocence sans relâche en s’appuyant sur l’information récusant les preuves qui l’ont inculpé. De par le monde, l’indignation a enflammé les manifestants, les critiques ont fusé de partout, les gens ont exprimé leur soutien par milliers; le doute s’est insinué au sein du tribunal, mais, extraordinairement, la décision finale n’en a pas été affectée. L’exécution à caractère incroyablement arbitraire de Troy Davis en est donc devenue un flagrant manque de jugement de la part du système judiciaire de la Géorgie. Une grande partie des preuves utilisées pour condamner cet homme s’est avérée erronée, et malgré cela, sa sentence est demeurée cruelle, voire inhumaine.

            En premier lieu, de sérieuses contradictions ont surgi à mesure que le cas évoluait et que l’on éclaircissait les circonstances ayant mené à la mort du policier. Par exemple, sept des neuf témoins se sont rétractés après le procès, et six d’entre eux ont avoué avoir été menacés ou intimidés par les officiers s’ils ne dénonçaient pas Davis. Pire encore : l’homme ayant rapporté l’incident à la police aurait par la suite admis que c’était lui qui avait tiré. En général, les témoignages, plutôt vagues, ne coïncidaient pas tout à fait et sont devenus invalides de surcroît, puisqu’ils étaient partiellement faux. D’autre part, il semblerait que la police ait influencé ces témoins lors de l’identification en leur montrant d’abord la photo de Davis, dotée d’un arrière-plan de couleur différente destiné à la distinguer des autres. Il y a également le fait qu’aucune preuve physique n’ait été avancée lors du procès (comme de l’ADN ou des empreintes digitales). Bref, tous ces renseignements auraient dû suffisamment ébranler le jury pour provoquer une réévaluation complète de la situation, ce qui ne fut évidemment pas le cas. Selon le New York Times, le refus de gracier Davis est « une erreur judiciaire tragique »: une évidence à la lumière des nouveaux développements dans le procès.

            En second lieu, même si l’on s’est obstiné à blâmer Troy Davis en faisant fi des retournements récents, sa sentence reste exagérée et immorale. La peine de mort ne devrait plus exister de nos jours, justement en raison du risque d’exécuter un innocent sans le savoir, et aussi parce que nous n’avons nullement le droit de s’octroyer le pouvoir d’enlever la vie de quelqu’un contre son gré, quoi qu’il ait fait. Cela s’apparente à comportement barbare et primitif qui ne devrait plus être courant aujourd’hui. D’ailleurs, Davis avait une multitude de défenseurs qui partageaient ce point de vue, dont l’ancien président américain Jimmy Carter, le pape Benoît XVI, William Sessions (jadis directeur de la F.B.I.)… la liste est longue. Même le ministre des affaires étrangères de la France a demandé qu’on le fasse acquitter, à l’instar du Mouvement français contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (le racisme ayant été un facteur potentiel dans l’arrestation de Davis) et de 630 000 Américains ayant envoyé une lettre à la Commission des grâces de Géorgie. Le secrétaire général du Conseil de l’Europe, Thorbjorn Jagland, a également exprimé son désaccord : « La raison n’est pas seulement notre désapprobation concernant la peine capitale, mais avant tout les doutes sérieux qui persistent sur l’intégrité de la condamnation ». Malheureusement, ces gens n’ont pas fait le poids et une loi méprisable a permi qu’on puisse disposer d’un être humain comme on jette un vieux bas sale.

            Dans l’ensemble, Troy Davis ainsi que tous ceux qui se sont déjà retrouvés dans un imbroglio pareil n’auraient jamais dû mourir; leur exécution fut une erreur irréparable, quoique parfaitement évitable. Il est absolument inacceptable de jeter le blâme sur un individu lorsqu’on ne peut pas prouver avec certitude qu’il en est imputable, surtout lorsque les conséquences impliquent l’euthanasie. Puis, la peine de mort en tant que telle est d’un archaïsme révoltant, allant à l’encontre de toute éthique décente; elle est une vraie honte dans notre société « moderne ». Avant de prononcer le verdict, il est nécessaire d’obtenir toute la vérité, et si l’on juge que l’accusé le mérite, la sanction ultime devrait être l’emprisonnement à vie, non pas une visite chez le bourreau. Ceci nous éviterait bien des situations catastrophiques semblables à celle-ci!